Quelques petites haches à douilles
Quelques petites haches à douilles

La qualité des images date de 1999, les références des détecteurs aussi. Mais voici comment se comporter en cas de découverte d’objets ou monnaies groupées dans un même trou et privilégier une fouille archéologique et scientifique.

L’exemple en détection

Olivier prospecte depuis trois-quatre ans environ. Depuis qu’il a commencé, la passion ne l’a jamais quitté, seul le manque de temps lui fait défaut. Il ne se doutait pas qu’avec son GTA 500 il allait intéresser des archéologues un jour… par une découverte faite au détecteur de métaux. Si Olivier à rejoint notre association dès le tout début, c’était pour détecter autrement; pour montrer que ce loisir, lorsqu’on est honnête peut apporter beaucoup et enrichir nos connaissances…

Ayant une après-midi à tuer (comme il dit lui-même) il chercha un champ où il pouvait prospecter. Seulement, à chaque fois les agriculteurs n’étaient que locataires des terres. Il s’agit de retrouver l’alliance du mari décédé quelques années plus tôt de la propriétaire actuelle. Au bout du sixième ou septième champ, il trouva des propriétaires qui acceptèrent gentiment. Sitôt dans le champ, le GTA 500 émet de beaux sons évoquant espoir, il creuse mais ce ne sont que des balles et des cartouches de la dernière guerre.

Persévérant Olivier continue : d’autres sons se font entendre tout au long de après-midi et à chaque fois, ce sont des reliefs de munitions de la dernière guerre qu’il déterre. Il commence à s’habituer à ce son long caractéristique d’une douille avec son projectile lorsque tout à coup, n’en croyant pas ses yeux, il met au jour une hache à douille. En repassant dans le trou, il constate que le Garret sonne encore. Il creuse de nouveau sort une autre hache et en aperçoit deux autres très grosses.

Un dépôt de haches à douilles

Il réalise qu’il vient de trouver ce que l’on appelle un dépôt de haches à douille. Aussitôt il arrête tout terrassement afin de préserver les couches archéologiques (s’il y en a, nous dira-t-il plus tard). Voilà un réflexe dont nombre de prospecteurs feraient bien de faire École lorsqu’ils découvrent des objets regroupés ou en lots. Sans même élargir le trou (ce que d’autres auraient fait, il est très conscient de l’importance de sa découverte) il appelle l’Association au 06.61.33.20.56 et m’indique qu’il voudrait faire connaître la découverte aux archéologues de sa région… je lui réponds qu’il n’y a aucun problème et que l’Association est là pour ça. Après un bref contact archéologique très amical à la DRAC concernée, nous décidons d’un rendez-vous, qui finalement sera repoussé trois fois pour incompatibilité de planning. Je me suis donc rendu la première fois avec Loïc un jour de semaine sur place, Olivier nous avait fait un plan fort juste du “site” et c’est au bout d’une petite demi-heure de prospection que nous découvrons la première hache.

Heureusement que le bulldozer n’a pas décapé directement à 50 cm.

A la fin de l’après-midi, nous en totalisions douze dont deux grosses, quatre dans le trou qu’Olivier avait fait et huit autour (à moins de 1,50 m). Il nous faut tout de même préciser que sans le 6000 DI de white’s, nous en aurions manqué quatre, ce détecteur disposant d’un mode permettant la détection d’un objet non ferreux à côté d’un ferreux (pour information).

Un exemple de hache à douille type Trehiou

Un deuxième rendez-vous fût pris pour une fouille plus complète afin de déterminer si un contexte archéologique pouvait être mis en évidence. Olivier qui venait de trouver un nouvel emploi en intérim ne put s’y rendre à son grand désespoir (on veut bien le croire). Cette fois-ci, un bulldozer doit “décaper” une surface de 10 m sur 10 m et tous les dix centimètres, un passage du détecteur sera effectué afin de ne perdre aucun témoins de cette époque.

Un coup de lame tous les dix centimètres

Pour ce faire, le 6000 DI est réglé sur la position “Hot-rocks accept” qui permet de détecter une poterie minéralisée. Un fragment de poterie peut être très intéressant pour une datation précise. Au niveau du contact avec les archéologues, tout s’est très bien passé, voici ce qu’ils nous ont appris et pourquoi cette découverte est importante et méritait d’être portée à notre connaissance :

L’AGE DU BRONZE :

Le développement de la métallurgie du cuivre (ou Chalcolithique) en Normandie au cours du IIème millénaire avant notre ère, s’accompagne d’une évolution profonde des traditions culturelles néolithiques (- 10 000, à – 2 000 av. J.C.).

Hache de type Trehiou

On la perçoit notamment dans un style céramique particulier auquel des vases “en forme de cloche” ont donné leur nom: le campaniforme. Les découvertes récentes relatives à ce contexte, effectuées dans la vallée de la Seine sont particulièrement riches d’enseignement. Cette étape se distingue du véritable Age du Bronze que l’on fait remonter au début du II ème millénaire av. J.C., époque à partir de laquelle est maîtrisée la technique de l’alliage cuivre-étain, et où l’on trouve les plus anciens vestiges métalliques du Bessin qui est un ensemble de poignards et de haches provenant vraisemblablement d’une sépulture. C’est en effet l’une des caractéristiques de l’Age du Bronze ancien que de voir se généraliser la pratique consistant à inhumer les morts accompagnés d’un riche mobilier funéraire dans une sépulture individuelle recouverte d’un tumulus de terre circulaire. En fait, seuls quelques individus privilégiés ont droit à cet hommage rendu par la collectivité. Le rassemblement d’objets métalliques abandonnés sous la forme d’un dépôt enterré dans une fosse sans aucun contexte archéologique apparent (pas de trace de feux, d’habitats, etc) est également l’une des particularités de l’Age du Bronze. Ils sont nombreux dans le Bessin. L’interprétation de ce phénomène est difficile. S’agit-il de dépôts votifs, de réserves?

L’AGE DU FER :

Les derniers objets témoignant des traditions héritées de l’Age du Bronze sont les haches à douille dites “armoricaines” parce qu’on les retrouve regroupées par centaines en dépôts sur l’ensemble du massif armoricain. Le dépôt découvert à Vaux sur Aure en 1875, en est un bon exemple. Les haches de Quettreville sont elles aussi caractéristiques de ces productions tardives contemporaines des premiers objets en fer. Les vestiges les plus anciens témoignant de l’introduction du fer dans le Bessin ne remontent qu’au VI ème siècle av. J.C. mais il s’agit de fragments d’objets dont l’état de corrosion n’a permis ni l’identification, ni la conservation. A partir du IV ème siècle avant J.C., Celtes et Gaulois commencent à être cités par les auteurs gréco-romains. Le second Age du Fer ou époque de la Tène, correspond à cette phase la plus récente de la préhistoire. Au cours des quelques siècles qui précèdent la conquête romaine, on peut enfin proprement parler de Gaulois, qui s’identifient dans ces innombrables tribus Celtes qui constituent la Gaule et dont les noms nous sont parvenus. On peut citer dans le Calvados les Baïocasses à l’ouest dans la région de Bayeux, les Viducasses au centre, autour de Vieux et les Lexovii à l’est, dans la région de Lisieux.

CONCLUSION :

Cette découverte faite dans la région de Quettreville sur Sienne permettra, après étude, d’en connaître un peu plus sur le passé de notre région. Ainsi une comparaison des haches découvertes par Olivier et celles en collection dans les différents musées de la région sera riche d’informations. Ensuite la simple étude des coulures de métal au niveau des joints des deux moules qui ont laissé leurs traces sur les haches au fur et à mesure qu’elles étaient coulées permettra de savoir si elles proviennent d’un même moule ou non. L’on pourrait facilement penser qu’avec cette découverte on puisse mettre en évidence l’existence probable d’un gros site de production en série de ces haches dans les environs. Mais pour l’instant cela reste une hypothèse séduisante qui se vérifiera peut-être à l’avenir. Les vestiges ne se renouvelant pas et chaque découverte étant une destruction, chaque document devient essentiel. L’excellente idée qu’a eue Olivier de ne pas trop remuer le terrain nous aura permis de prélever ces haches dans leur contexte. Toute découverte doit être signalée le plus rapidement, pour permettre aux scientifiques d’en recueillir les fruits.

Toutes les haches étaient dans l’épaisseur du labour. Si Olivier n’était pas passé dans ce champ

Depuis la découverte, ce dépôt de mobilier de l’âge du bronze est exposé au musée BARON Gérard conformément aux vœux de la propriétaire du terrain et de l’inventeur.

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